Article plein air d'ailleurs

photos Éric Marchand

VOLER DE SES PROPRES AILES

DOSSIER / ÉTATS-UNIS / CAP HATTERAS / DELTAPLANE

Publié le 1 juin 2012, par Tania Berthelot

NAGS HEAD, LA PLUS GRANDE DUNE DE SABLE NATURELLE DE L’EST DES ÉTATS-UNIS. C’EST LÀ, À CAP HATTERAS EN CAROLINE DU NORD, QUE SOUFFLE UNE BRISE OCÉANE CONSTANTE QUI EN FAIT UN ENDROIT IDYLLIQUE POUR APPRENDRE À VOLER. ICI, LES SPORTS DE VENT FONT FUREUR. ET LE DELTAPLANE N’Y ÉCHAPPE PAS.

À mi-chemin entre Montréal et Miami, Cap Hatteras (Caroline du Nord) est une étroite bande de sable composée de trois îles. Ces îles sont reliées, du Nord au Sud, par une route asphaltée sur 200km. Offrant peu de barrières naturelles contre les ouragans, les îles sont souvent balayées par de forts vents. Surfeurs, véliplanchistes et kiteboarders des quatre coins de la planète y voient là une opportunité d’y pratiquer leur sport favori.

C’est le cas de beaucoup de Québécois qui convergent vers la destination au printemps ou qui choisissent d’y prolonger l’automne. Les sports de vent sont devenus la marque de commerce de l’endroit. On y trouve même un «spot» de pratique surnommé le Canadian Hole.

Il faut une longue journée de voiture depuis Montréal avant de voir et de sentir la mer s’ouvrir à nous: des odeurs d’iode puis ce sentiment de rouler vers quelque chose de plus en plus étroit. Le paysage humanisé tranche avec celui de la Virginie voisine. Les maisons, construites sur pilotis, sont faites de bardeaux aux mille nuances de bleu et de gris. En bordure de la route, beaucoup de surf shops et de gros magasins de surf bon marché confirment que la vie de beach bum a ses adeptes au nord du tropique.

ENTRE OCÉAN ET LAGUNE

Ici, la brise océanique est rafraîchissante au printemps comme à l’automne. En plein été, les climatiseurs fonctionnent à bloc dans ces chics cabanes très souvent louées aux mordus du vent voulant vivre leur passion au plus près. On peut aussi profiter de très agréables sites de camping tel celui de Frisco, sur l’île centrale d’Hatteras, offrant un accès direct à la lagune à l’abri du soleil.

Les jours de vent modéré, le côté intérieur de l’île est un immense terrain de pratique pour kitesurfs et planches à voile. Par vent fort, les vagues attirent les plus fougueux vers la mer, côté Atlantique. Ici, les activités tournent principalement autour du vent. Demain, nous piquerons vers le nord où m’attend Matt, mon instructeur de deltaplane. Je suis fébrile car ce sera mon tout premier vol en solo!

L’école «Kitty Hawk» fondée en 1974 par John Harris – l’un des pionniers du deltaplane aux États-Unis – est la plus grosse école de deltaplane au monde. Une équipe d’instructeurs chevronnés y donnent chaque année des formations à plus de 10 000 personnes âgées entre 8 et 80 ans, de niveaux débutant à avancé. Située à Nags Head dans le parc d’état de Jockey’s Ridge, au nord de l’île, l’école offre une vue panoramique à 360° sur la mer et la terre.

La brise constante de l’océan et la zone d’atterrissage en terrain sablonneux ont motivé John Harris à y établir son école. C’est aussi là, tout près, que les frères Wright réussirent le tout premier vol motorisé – en 12 secondes – à bord d’un avion en bois à deux hélices. C’était en 1903. Inspirée par cet exploit historique, je m’inscris au cours le plus populaire offrant cinq vols en solo pour 99$ US. Je me sens d’aplomb à apprendre dans ce contexte, persuadée que le seul moyen de dissiper certaines craintes face au vide, est de se lancer sur une pente école douce à faible inclinaison.

Ce n’est pas surprenant de croiser des adeptes du kitesurf ou autres sports de vent venus faire du deltaplane car l’expérience offre des similarités: sentiments de légèreté, liberté, finesse dans les manœuvres, bonne connaissance des vents, sports aériens. Par contre, le deltaplane se distingue par la structure rigide et profilée de l’aile d’une très grande ressemblance à un oiseau en vol et par le pilotage dit «pendulaire», corps étendu, face vers le sol. Il remplit le mieux le rêve de voler comme un oiseau!

LA THÉORIE D’ABORD

Le cours de trois heures débute en classe avec une petite heure de théorie. De façon concise et claire, Matt transmet avec passion ses connaissances sur les techniques de vol en mimant les gestes à poser avec un deltaplane miniature. Une courte vidéo continue de captiver notre attention en résumant les étapes de vol, l’historique du sport et des lieux. Puis, vient la petite marche tant attendue vers le sommet de la dune, harnais et casque en main, pieds engloutis dans un sable déjà chaud à dix heures du matin. Sur le site de départ, les ailes de deltaplane, spécialement conçues pour l’entraînement, sont déjà montées et alignées le nez au vent. L’approche des instructeurs est très professionnelle et met en confiance. Gage de sécurité additionnel: les lieux sont complètement dégagés, loin de tout obstacle. La vue panoramique est à couper le souffle. Au premier coup d’œil, on se croirait dans le désert ou à la dune du Pila, en France.

CÔTÉ PRATIQUE

Ce matin, le vent annoncé est léger du nord-ouest à cinq miles mais suffisant pour voler.  Après une bonne dose de conseils, chaque participant s’élance sur la pente inclinée avec son instructeur courant à ses côtés pour le décollage et suivant des indications se perdant elles-mêmes dans le vent. Un petit drapeau rouge en bas de la dune indique la direction à suivre. Et voilà, c’est parti! Après une petite course dans le sable, mon corps tout entier flotte à quelques pieds au-dessus de la dune.

Dans les airs, le pilotage sera intuitif et simple. Les manœuvres de la barre sont graduelles; on déplace notre corps de droite à gauche par rapport au centre de gravité afin de piloter l’aile. En vol, on se sent envahi par un sentiment très puissant de liberté et de légèreté. Selon les vents, on peut monter jusqu’à 15 pieds et parcourir plus de 300 pieds dans les airs. Et que dire de la beauté des paysages qui fait oublier l’anxiété d’avoir à se poser. Car la complexité réside – disons-le – dans l’atterrissage.

La technique consiste à effectuer un palier au ras du sol, soit voler en ligne droite à 50cm au-dessus du sable, les jambes bien étirées vers l’arrière, laisser ralentir l’aile progressivement, puis pousser énergiquement la barre vers le haut pour redresser l’aile avant de poser ses pieds sur le sol comme un oiseau. Si les objectifs sont habituellement la durée du vol et le gain d’altitude, pour moi, plus modestement et vu les conditions de vent, c’était d’arriver à me poser en douceur au cinquième et dernier vol… Mission accomplie! L’expérience est totalement enivrante!

ET QUOI ENCORE?

Il y a tant à faire dans les alentours pour ceux qui préfèrent la terre ferme aux cheveux en broussaille. Depuis Nags Head, c’est très agréable de découvrir à vélo les jardins de Kill Devil Hills, le monument dédié aux frères Wright, la scène de leur premier vol reconstituée en sculptures grandeur nature. Visiter le passionnant musée dédié aux aventuriers est un incontournable.

Certaines pistes cyclables tranquilles, à l’ombre des grands arbres, longent la lagune. D’autres petites routes calmes mènent vers la campagne, sous la végétation luxuriante. Autre expérience inoubliable: le «Merchants Millponds State Park», 100km au nord-ouest de Kill Devil Hills (route 158), près de Sunbury. On peut y louer des canots et glisser sur les eaux vertes et mystérieuses du plus septentrional bayou des États-Unis, entre les curieux arbres tropicaux où pendent les longues barbes de mousse espagnole: 300 hectares de forêt inondée et enchantée ou l’on peut observer tortues, oiseaux, papillons, plantes étranges...et alligators paressant sur un arbre mort.

Tout le Cap Hatteras et ses alentours invitent à la plus douce des farnientes comme aux sensations et découvertes les plus excitantes!

Volume - 9

Partagez l'article!


Derniers articles

Camp de kayak avec les épaulards - Jour 4
Camp de kayak avec les épaulards - Jour 3
Camp de kayak avec les épaulards - Jour2
Camp de kayak avec les épaulards

Recherche

Nouvelle édition »

s'inscrire à l'infolettre

Calendrier des activités